Parcours de qualification - épisode 1

Publié le par Lucas

Qualif4 025« La qualif’, c’est d’abord pousser son bateau » me disait Yves Le Blévec, figure de la Classe Mini et vainqueur de la Transat 6.50 de 2007. Il est 2h00 du matin, dans le port de La Rochelle, je tente de suivre le conseil. Comme tous les Minis, ONG Conseil est dépourvu de moteur et les manœuvres de port sont parfois de vrais casse-têtes.

 

Arrivé au port en fin d’après-midi, j’ai pris mon temps pour charger le matériel et préparer le bateau pour les 1000 milles qui l’attendent, une façon aussi de prendre la mesure de la navigation à  entreprendre. Ce parcours de qualification ne s’annonce pas particulièrement difficile techniquement, ce sera juste la première fois que je passe une semaine seul en mer. Tout simplement.

 

Au milieu de la nuit rochelaise, je décide donc que le moment de partir est venu. J’ai le sentiment d’être détendu, il me faut pourtant faire un effort pour plaisanter avec l’officier du port qui tamponne mon livre de bord. Les voiles hissées, poussé par un vent d’est modéré, la tension s’évacue progressivement. La Lune dans son premier quartier se lève, en route pour l’Irlande.

 

Les deux premières journées de navigation sont assez tranquilles, la surprise étant de naviguer sur un bateau de course sans être en course : où mettre le curseur ? On allume et on voit jusqu’où on tient ? On adopte le mode croisière, au risque de s’ennuyer très vite et pour longtemps ? Sans trop me poser de questions, je sers le bateau au mieux pour que les milles défilent.

 

Un des tronçons intéressants du parcours de qualification est la traversée de la Manche. Les courants y sont assez forts, il y a beaucoup de navires de commerce et de pêche et la météo y est parfois rugueuse. Ce dimanche matin, en laissant la pointe de la Bretagne dans le sillage, je suis pourtant d’humeur légère tant le vent paisible et le soleil invitent à la détente.

 

Trois heures plus tard, on ne voit plus à 100 mètres : la brume est tombée, je suis dans le rail des cargos au nord d’Ouessant, cerné par des monstres d’acier dont je ne perçois que le cri lugubre des cornes de brume. La tension est aussi palpable que l’eau dans l’air. Je me raccroche à l’espoir que la veille est correctement faite sur les passerelles et que l’appareil qui amplifie l’écho radar d’ONG Conseil est efficace.

 

La pointe de la Cornouaille anglaise est passée par une nuit très calme, sous le spot lunaire. La journée qui suit commence dans un vent très léger et sous un soleil de plomb : l’occasion de faire un grand ménage sur le bateau, de mettre à sécher les vêtements mouillés, de se laver (autant que possible…) et de sortir le sextant pour quelques relevés.

 

La douceur de ces moments ne dure pas (heureusement, dans un sens, sinon j’y serais peut-être toujours). Un vent de nord-est froid, turbulent, hargneux lève maintenant une mer courte et désordonnée. A croire qu’Eole a recruté chez les avants gallois. Contre le vent et les vagues, le bateau se fraye un passage en force dans les gerbes d’écumes. Dans ces conditions, confier la conduite du bateau au pilote automatique fait perdre facilement 10% de vitesse. J’enchaine donc une quinzaine d’heures à la barre à tenter de placer au mieux l’étrave d’ONG Conseil pour ne pas qu’elle s’arrête dans la vague.

 

A l’approche de l’Irlande, la cote atténue la force du vent et la mer devient plus avenante. Au petit matin, la bouée Coningbeg scintille droit devant. Les premières lueurs du jour laissent apparaître les falaises noires égayées de quelques taches vertes sur les vallons en arrière fond. Une fois de plus, je vois l’Irlande, contourne une balise et m’en vais… Le voyage en Mini, ce n'est pas tout-à-fait comme avec Easy Jet.

 

La suite est à lire ici.

Publié dans Navigation

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